Lettre 850


Année 388


(Dossier Eusébios XXVII/26)


Même destinataire qu'ep. 846. Haut fonctionnaire à la cour, Eusébios peut accueillir les ambassadeurs, comme il l'a fait pour ceux d'Émèse ; il s'agit là de ceux d'Antioche (qui viennent féliciter l'empereur pour sa victoire contre Maxime  et apporter l'or coronaire), lors de la deuxième ambassade de 388. 


Εὐσεβίῳ


1. Εἰ μὲν ἄλλος τις τῶν ἀγνοούντων ἡμᾶς ἦν ἐν ᾧπερ αὐτὸς εἶ, διδάσκειν ἂν ἔδει με καὶ λέγειν γονέας τε ἑκάστου καὶ τροφὴν καὶ παιδείαν κοινούς τε πόνους ἐμοῦ τε καὶ αὐτῶν ὑπὲρ λόγων· νῦν δ’ αὐτὸς ἄν μοι δοκεῖς διδάξαι τοὺς ἀγνοοῦντας. 2. τούτου δὲ οὕτως ἔχοντος καὶ τῶν πρέσβεων ὑπὸ σοῦ φιλουμένων τραχὺ μὲν οὐδὲν ἔσται τῆς περὶ ταῦτα ὁδοῦ, διὰ δὲ λείας ἄξεις αὐτοὺς ἁπάσης συμπράττων μὲν ἐνοἷς αἰτοῦσιν εἰς τὸ τυχεῖν, συμπράττων δὲ εἰς τάχος, ὅπωςἔχοιμέν τε τοὺς ἄνδρας οὐ πολλῶν ἡμερῶν ἀνηλωμένων καὶ τῆς πρεσβείας εἰς δόξαν ἀπολελαυκότας. 3. ἐμοὶ δὲ τῆς λύσεως, ἣν οἶσθα, ἀνῃρημένης ἐγένετο μέν τις λύπη, ταχέως δὲ ἐξεκρούσθη λογισμοῖς. ὁ γὰρ δὴ θεῖος Θεοδόσιος ἁμαρτόντας μὲν ἤδη τινὰς ἔσωσε, δίκην δὲ παρ’ οὐδενὸς οὐδὲν ἀδικοῦντος ἔλαβεν.

à Eusébios


 1. Si c’était quelqu’un d’autre - un de ceux qui ne nous connaissent pas - qui se trouvait au poste où tu es, je devrais l’informer et évoquer les parents de chacun1, son éducation, sa formation et les efforts que nous avons partagés, eux et moi, au service de l'éloquence2. Mais, en réalité, il me semble que tu pourrais toi-même renseigner les ignorants. 2. Les choses étant ce qu'elles sont et les ambassadeurs étant appréciés de toi, leur route en ces parages n’aura rien de rocailleux mais tu les conduiras, tout du long, par une route sans cahots3 : tu les aideras à obtenir ce qu’ils demandent et tu les aideras à l’obtenir vite, de sorte que nous retrouvions, sans avoir perdu trop de jours, des hommes qui auront tiré profit de l’ambassade pour leur gloire4. 3. Pour ma part, après l'annonce de la délivrance5 que tu sais, j’ai eu quelque chagrin mais il fut vite écarté par des réflexions. Car, de fait, le divin Théodose en a déjà sauvé qui s’étaient fourvoyés et n'a infligé aucun châtiment à qui n’avait aucun tort6. 


1 De chacun des ambassadeurs  : cette présentation est un préalable nécessaire à l'introduction des membres de la délégation.

2. Les ambassadeurs sont des notables qui ont été formés dans les écoles de rhétorique et, assez vraisemblablement, dans la classe de Libanios.

3. La métaphore de la route est ici très concrète : elle évoque les difficultés à s'orienter dans les dédales et arcanes de la cour, mais elle renvoie aussi aux difficultés du voyage par voie terrestre qui a conduit les légats jusqu'à destination. 

4. Le séjour à Constantinople pourra être relativement court si les ambassadeurs bénéficient de l'aide d'Eusébios :  ils reviendront dans leur patrie auréolés du succès de leur ambassade. 

5. Libanios a été lavé du soupçon de soutien à l'usurpateur Maxime. Le terme grec λύσις désigne une délivrance, une libération : toute inquiétude est désormais levée.

6. Libanios célèbre ici la magnanimité de Théodose, juste envers les innocents et clément envers les coupables : il termine sur une note de flatterie envers un empereur auquel il tient à manifester sa loyauté.