A



Antioche sur l’Oronte


Antioche (Antioche-sur-l’Oronte ou Antioche de Syrie ou encore Antioche-près-de Daphné) est située sur le cours inférieur de l’Oronte à une vingtaine de kilomètres de la Méditerranée. Elle fut fondée par Séleucos Ier Nicator en 300 avant J.-C., puis devint la capitale du royaume séleucide : elle tirait son nom d’Antiochos, à la fois le père et le fils de Séleucos. Après que Pompée eut réduit le royaume séleucide en province (64 av. J.-C.) elle demeura la capitale de la Syrie, province impériale, garnie de trois légions. L’importance et le rayonnement d’Antioche ne firent que croître à l’époque tardive : à la fin du IIIe siècle (réforme de Dioclétien) elle devint le siège du diocèse d’Orient ainsi que résidence impériale. Elle servit alors de base arrière pour les expéditions militaires lancées vers l’est, en particulier contre l’empire perse. 

La population d’Antioche fut importante, cosmopolite et multi confessionnelle ; elle ne cessa de croître jusqu’à l’époque tardive : on estime qu’au temps de Libanios elle pouvait compter jusqu’à 300 000 habitants. Les communautés juive et chrétienne y furent importantes. Elle était, au IVe siècle, la troisième ville de l’Empire romain, après Rome et Constantinople, dépassant même Alexandrie : sur la célèbre Table de Peutinger, trois vignettes (ajoutées au IVe s.) représentent justement Rome, Constantinople et Antioche. Sa parure urbaine et ses aménités étaient célèbres, ce que ne manque pas de célébrer Libanios dans l’Éloge d’Antioche (Antiochicos), discours prononcé lors des concours olympiques de 356. Cependant la cité, dotée d’un riche territoire (chôra) qui fournissait les ressources nécessaires, connut aussi de nombreuses difficultés : vicissitudes politiques (notamment lors des épisodes d’usurpations) ou tremblements de terre. Le plus connu est celui qui frappa la ville en 115 et faillit emporter l’empereur Trajan qui y séjournait. 

Les fouilles menées entre 1932 et 1939 dans la ville moderne d’Antakya (sandjak d’Alexandrette, alors sous mandat français) n’ont permis que quelques sondages et le dégagement de plusieurs mosaïques des villas de Daphné. Les explorations archéologiques ont repris récemment dans deux directions : remparts et aménagement de la citadelle (G. Brands) et d'autre part fouilles au coeur de la ville avec le dégagement d'un vaste ensemble qui est peut-être le forum de Valens (H. Pamir et équipe turque).



Libanios, Or. XI, Antiochikos ; Downey 1961 ; Saliou 2006 ; Saliou 2013.


B


 Bérytos


Colonie romaine de Phénicie, fondée sous le règne d'Auguste. Son territoire très étendu englobe une partie de la plaine intérieure, la Beqaa, jusqu'au sanctuaire d'Héliopolis (Baalbek). Pôle de latinité au Proche-Orient, elle fut le siège d'une école de droit, où les textes juridiques étudiés sont certes en latin, mais commentés en grec : elle resta célèbre jusqu'au VIe siècle et accueillit les jeunes gens qui  se destinaient aux professions juridiques et administratives, formant ainsi les futures élites civiles de l'Empire. On comprend l'animosité de Libanios contre cette formation qui concurrençait la voie classique des études littéraires. 

Anne-Rose Hosek : https://doi.org/10. 4000/mondesanciens. 501


C


Cappadoce


Province qui occupe une partie du haut plateau anatolien, à l’est de la Galatie. Ces hautes terres culminent au mont Argée (3917 m). La capitale est Césarée de Cappadoce (actuelle Kayseri). Elle est située, comme Ancyre, sur de grands axes économiques, mais qui ont aussi une grande importance stratégique à l’est de l’Empire. Césarée est une ville de culture et l’un des centres du christianisme des premiers siècles : elle est la patrie du saint évêque Basile. Libanios est en relation avec le milieu des notables et des rhéteurs de Césarée, peut-être même Basile lui-même, et il accueille plusieurs élèves cappadociens.

Métivier 2005.



Constantinople


Capitale de la partie orientale de l'Empire, puis de l'Empire d'Orient, à partir de la partition de 395, elle fut choisie par Constantin en 324, puis inaugurée en 330 sur le site de l'ancienne colonie grecque de Byzance. Cette fondation illustrait la volonté de déplacer le centre de gravité de l'empire vers l'Orient et, en particulier, de se rapprocher des terrains d'opérations militaires situés sur le Danube et vers la Perse. Le site disposait d'atouts naturels, en particulier par son ouverture sur la mer (détroit du Bosphore et Corne d'Or), mais souffrait aussi de déficits structurels, notamment de ressources en eau. Constantin l'aménagea à la mesure d'une capitale, en particulier avec un forum circulaire, dit de Constantin, et une voie à portiques, la Mésè, qui conduisait à la Porte Dorée, point d'arrivée de la via Egnatia, la grande voie transversale balkanique. Un palais, un hippodrome, une basilique ainsi que des églises furent construits tandis que Constantin se préoccupait d'y attirer la population. La parure monumentale fut complétée par les successeurs de Constantin. Constantinople devint progressivement, au IVe siècle, la résidence régulière, puis permanente des empereurs, en particulier sous Théodose Ier. Elle joue alors véritablement le rôle d'une nouvelle Rome.

Les institutions de la nouvelle capitale ont en effet été calquées sur celles de Rome, mais elles n'ont pris de consistance qu'au fur et à mesure. Le Sénat est fondé par Constance II vers 351. Jusqu’en 359, il n’existe pas de préfet de Constantinople, mais un proconsul, héritier des anciens archontes de Byzance. Quand le préfet est créé, avec les mêmes attributions que le préfet de la Ville de Rome, il est assisté seulement par le préfet des vigiles chargés de lutter contre les incendies.


Dagron 1984 ; Mango 1985.

       



Cyrrhos/Cyr


Cité fondée par Séleucos Nicator vers 300 av. J.-C. et située à l'est d'Antioche, capitale d'une vaste région, la Cyrrhestique. Elle tire son nom de la cité de Cyrrhos en Macédoine. Elle fut un centre administratif et commercial romain important, mais aussi un point stratégique sur la route allant d'Antioche à l'Euphrate, en passant par Zeugma. Dans l'Antiquité tardive, la cité devait être très peuplée, comme le rapporte Théodoret de Cyr (v. 393-vers 458), évêque du siège épiscopal de Cyr, théologien et auteur prolixe, notamment d'une Histoire ecclésiastique qui prolonge celle d'Eusèbe de Césarée, de 325 à 429.

Sartre 2001 ; Saliou 2020, en partic. p. 277



D


Daphné


      Faubourg d’Antioche sur l’Oronte, situé à 7 kilomètres au sud-ouest de la ville (aujourd’hui Harbiye) ; il était célèbre au point que l’on parlait d’Antioche « près-de-Daphné » (ἐπὶ Δάφνῃ ou πρὸς Δάφνην). Il fut le cadre d’un sanctuaire dynastique des Séleucides dédié à Apollon dès les origines de la ville, et resta un lieu de pèlerinage et de séjour d’agrément pour les Antiochéens : ses jardins et ses résidences de prestige attiraient les visiteurs et les riches citadins.  

Daphné s’étend sur un plateau au sud duquel jaillissent des sources, particulièrement abondantes : elles ont fait la renommée du site et permis d’alimenter Antioche en eau grâce à d’imposants aqueducs. C’est également par l’eau que la divination était pratiquée dans le sanctuaire oraculaire d’Apollon, garni d'un bois sacré dont les arbres furent protégés même après l'interdiction officielle du polythéisme. D’autres cultes étaient associés à celui du dieu principal et une partie des concours olympiques se déroulaient à Daphné, notamment dans le stade. À l’époque chrétienne, des martyria et des églises ont transformé le paysage religieux : la présence du martyrion de Babylas au sein même du sanctuaire d’Apollon provoqua, en 362 ap. J.-C., sous Julien, un violent conflit religieux dont le paroxysme fut l’incendie du temple d’Apollon. Ce fut la fin de l’histoire païenne du site. Celui-ci continua de jouer un rôle à la fois économique (alimentation en eau), religieux et symbolique, car la mémoire et le renom de Daphné ont attiré chroniqueurs, dessinateurs et voyageurs. 

Syria 97, 2021 :  https://journals.openedition.org/syria/9292

                       


E


Égypte


Province qui jouit d’un statut particulier depuis sa conquête en 30 av. J.-C. par Octave. Elle est encore au IVe  siècle gouvernée par un Préfet Augustal. Après les réformes administratives, l’ensemble égyptien est divisé en trois provinces : la Thébaïde (Haute-Égypte) est ainsi sous la conduite du praeses Thebaidos. Il faut ajouter les deux provinces (Inférieure et Supérieure) de Libye. L’Égypte est toujours extrêmement prospère et demeure le grenier à blé de l’Empire, mais les vaisseaux de l’annone alimentent désormais Constantinople. Alexandrie, à l’extrémité occidentale du delta du Nil, est une métropole puissante et cosmopolite, très largement chrétienne.

Gascou, dans Morrisson 2004, p. 403 sq.



Émèse


Cité située au sud de la Syrie, sur l’Oronte, et qui donne son nom à l’Émésène. C’est l’actuelle Homs. Elle se situe en province de Phénicie Seconde, à l'ouest de Palmyre. C'est un carrefour stratégique important, au croisement de l'axe nord-sud formé par la vallée de la Bekaa, entre les massifs du Liban et de l'Anti-Liban, et de la trouée naturelle est-ouest qui relie la mer à l'oasis de Palmyre. Elle se situe au centre d'une plaine vaste et fertile située à environ 500 mètres d'altitude. 

La dynastie des Sampsigéramides a dirigé la principauté d'Émèse entre la fin de l'époque hellénistique et l'annexion par Rome, entre 72 et 78 ap. J.-C. : la lignée des princes d'Emèse continua à jouer un rôle prépondérant, puisque ses descendants ont fourni certains des prêtres du culte d'Elagabal et que les impératrices syriennes de la dynastie des Sévères en étaient issues. La cité connut en effet une brillante période sous les Sévères (en particulier Héliogabale et Sévère Alexandre), promue colonie sous Caracalla et dotée du ius italicum. La cité, qui honorait Elagabal (« dieu-montagne ») divinité d'origine sémitique, resta longtemps un foyer du polythéisme, comme le souligne Julien opposant la piété de « villes saintes, esclaves des dieux comme moi » à Antioche (Misop., 357c, 361a). Toutefois la chute de Palmyre, ruinée par Aurélien en 272, signa en partie le déclin d'Émèse. Elle semble être devenue assez tardivement chrétienne. 

H. Seyrig, « Antiquités Syriennes. 76. Caractères de l'histoire d'Émèse », Syria 36, 1/2, 1959, p. 38-89 ; E. Lipinski, « Elaha Gabal d'Émèse dans son contexte historique », Latomus 70, 4, 2011, p. 1081-1101.




Europe


La première utilisation du terme Europe pour désigner un continent se rencontre chez Hésiode, vers 590 av. J.-C., quand les Grecs cherchent à se situer et à se définir par rapport à l’Asie. Si l’Atlantique et la Méditerranée  constituent des limites naturelles à l'ouest et au sud-ouest, les limites est et sud-est ont été plus difficiles à établir. Au Ier siècle av. J.-C., Varron situe la division entre l’Asie et l’Europe au Bosphore. La Géographie de Ptolémée  fixe, au IIe  siècle ap. J.-C., la cartographie de l’Europe.

Libanios emploie Europe au sens d’Occident par opposition à l’Orient de Constantinople et d’Antioche. La partition entre les deux empires – Occident et Orient – est officielle à partir de 395.



G


Galatie


Région du centre de l’Asie Mineure tirant son nom du peuple des Galates (Celtes) qui y ont migré au début du IIIe siècle avant J.-C. Elle est située entre la Bithynie au nord-ouest, la Phrygie à l’ouest et la Cappadoce à l'est. Du fait de son importance stratégique, Auguste en fait une province, avec Ancyre comme capitale (future Ankara). Cette cité, étape importante sur les itinéraires trans-anatoliens, devient résidence d’été des empereurs à la fin du IVe siècle et au début du Ve siècle. Sous Dioclétien, la Galatie est divisée en deux provinces, Galatie Première et Galatie Salutaire et dépend du diocèse du Pont. Elle est évangélisée dès les débuts de l’ère chrétienne. 

Morrisson 2004.


N


Nisibe


Ancienne Antioche de Mygdonie. Cette cité de Haute Mésopotamie, carrefour stratégique et commercial, fut érigée en colonie romaine en 195 ap. J.-C. Elle fut un centre important du christianisme de langue syriaque et l'enjeu de nombreuses opérations militaires entre Romains et Perses.

Sartre 2001.


O


Oronte (L')


 Fleuve du Proche-Orient (en arabe, Nahr al-‘Asi, « le fleuve rebelle ») long de 571 km, le seul à couler du sud vers le nord. Il prend sa source dans la Bekaa, près de Baalbek (antique Héliopolis), au Liban ; il s’écoule parallèlement à la côte syro-phénicienne, traverse de nombreux défilés, creuse une large vallée à l’est, puis fait un coude dans la dépression de l’Amuq (lac marécageux) pour s’orienter vers le sud-ouest. Renforcé par ses deux affluents, le Kara Sou et l’Afrin, il traverse alors Antioche, souvent dénommée Antioche-sur-l’Oronte pour la distinguer de ses homonymes, et se jette dans la Méditerranée. Dans l’Antiquité, il était appelé Draco, Typho ou Axius. Il est personnifié et représenté aux pieds de la Tychè d’Antioche ; il constitue un marqueur d'identité de la cité. 

Comme le Nil, ce fleuve a favorisé l’implantation de villes prospères : Homs (Émèse), Rasan, Hama (Epiphaneia), Apamée, Antioche. Les norias de Hama fonctionnent depuis l’Antiquité. L'Oronte est un axe de vie reliant d’importantes cités, mais son parcours chaotique lui interdit d’être un axe de communication sur toute sa longueur. Entre Antioche et la mer, le fleuve est une voie navigable essentielle, à la fois économiquement et stratégiquement. Libanios lui accorde une large place dans son Éloge de la cité (Or. XI, 201-211 ; 259-263).  

Weulersse 1940 ; Syria, Suppl. IV, 2016,« Le fleuve rebelle» : https://journals.openedition.org/syria/4749

https://journals.openedition.org/syria/docannexe/image/4755/img-2.jpg


P


Palestine


Région du Levant située entre le plateau du Golan, au nord, et le désert du Néguev, au sud. Elle comporte une longue façade maritime sur la Méditerranée dans le prolongement de la Phénicie. Elle comprend la Galilée au nord et la Judée au sud, avec Jérusalem. À l'époque romaine, une partie de la Palestine devient la province de Judée, dont la capitale est Césarée. À l'époque tardive, elle est divisée en trois provinces, Palestine Première (capitale Jérusalem), Palestine Seconde et Palestine Troisième. 

Dauphin 1998.



Phénicie


Région située au sud de la Syrie et comprenant entre autres les cités de Tyr, Byblos et Beyrouth. Ce sont à l'origine les Grecs, vers le VIIIe s. av. J.-C., qui désignent ainsi  - par allusion à la couleur rouge (phoinix en grec) - la bande côtière qui s'étend du mont Cassius, au nord, à la frontière égyptienne, au sud. Cette région de très riche culture et dont la langue, le phénicien, disparaît au tournant du Ier siècle av. J.-C., devient ensuite une province romaine, à partir de la conquête de Pompée. Elle est rattachée à la province de Syrie, puis avec la réorganisation administrative de l'empire tardif, elle se subdivise en Phénicie Première et Phénicie Seconde. 

Sartre 2001, p. 39-46.


R        


Rome


La Ville reste jusqu’à la fin du IIIe siècle la capitale incontestée de l’Empire. Abritant le Sénat et les cultes du peuple romain, elle demeure la détentrice de la légitimité. Mais en 324, Constantin, en décidant de fonder une nouvelle résidence sur l’emplacement de la cité grecque de Byzance, a fait en sorte qu’une seconde Rome vînt à terme supplanter l’ancienne, déplaçant le centre de gravité vers l’Orient. 

La Rome du Bas-Empire reste peuplée et son urbanisme marqué par les grands monuments et aménagements dont une histoire millénaire l’avait parée : Constance II qui la visite en 357 en est ébloui, selon Ammien Marcellin. Son aristocratie sénatoriale, encore largement païenne, reste puissante. Cependant, au IVe siècle, dès Constantin, la Ville commence à prendre le visage d’une cité chrétienne : les empereurs – sauf Julien – y font bâtir des églises richement décorées, principalement situées en périphérie, plusieurs étant construites pour honorer les tombes de martyrs. C’est une ville prospère et peuplée que menace Alaric en 408 et 409, puis qu’il pille en 410.





T        


Tyr


Cité d’origine phénicienne. C’est à l’origine une île, fortifiée, et dotée de deux ports ; sur le continent, s’étendent des faubourgs qui constituent la pérée. Grâce à un passage à gué élargi, l’île devient presqu’île. 

Au IVe siècle, la cité est située dans la province de Phénicie Première. Tyr est un port essentiel dans le commerce méditerranéen, situé au débouché des routes venues d’Orient et d’au-delà, comme le signale l’Expositio totius mundi : « il n’existe pas dans tout l’Orient une ville qui ait une population aussi dense : elle a des hommes d’affaire riches et capables en tout. » L’une des spécialités locales, particulièrement prestigieuse, est l’exploitation de la pourpre, depuis la recherche des coquillages (murex) jusqu’à la teinture des soieries importées d’Extrême-Orient. 

https://archeologie.culture.gouv.fr/proche-orient/fr/tyr-2